note d'intention 1

Quand j’ai commencé à écrire, vers mes dix ans, c’était pour exprimer mes premières émotions issues des expériences survenues en dehors du cercle familial. Raconter ces choses-là me permettait de garder le souvenir des sensations éprouvées, de me libérer du poids du secret et de me servir des mots pour dissiper le trouble suscité par mes sentiments naissants. Je dessinais des chevaux et j’écrivais des poèmes ou je déclarais ma flamme dans un flot de larmes à Anne Simonet qui habitait le château en face de chez moi et qui n’avait d’yeux que pour Hervé Derozier, le redoublant de la classe, nul en français mais super bon en sport. Je pliais soigneusement mes œuvres en six et les cachait dans un endroit où je savais que personne n’irait les chercher. Les soirs de nostalgie, je relisais longuement mes textes et me plongeais dans la contemplation romantique de la fenêtre éclairée de ma chère voisine. Par dépit j’avais fini par me marier avec Claire Waldura sur le terrain de basket. Ce fut de courte durée et je ne fus pas un très bon mari.